Donald Trump est de retour
Taxer les importations européennes et chinoises :
Quelles conséquences et quelles réponses
Auteur: M. Mazen Hammoud , Expert économique – Paris
Donald Trump le républicain, à peine réélu président des Etats Unis en Novembre dernier pour prendre le pouvoir le 20 Janvier 2025, les marchés monétaire et financier en Amérique ont réagi comme si le choix du président républicain était un gilet de sauvetage et un nouveau chemin que le pays attendait pour changer de direction et couper avec la tradition économique socio-démocrate. Mais la différence cette fois-ci, et aussi pendant le premier mandat de Trump, est que le président élu est un homme d’affaires très riche qui peut réanimer les marchés certes, mais son élection ne reflète pas forcement les fondements économiques sur lesquels les marchés américains peuvent s’appuyer. Parmi ces fondements on trouve la création d’emplois qui conduit à une croissance économique, encourager les investissements locaux et étrangers et une politique budgétaire qui renoue avec une baisse des impôts qui soutien le pouvoir d’achats des citoyens sans aller chercher une alternative qui peut nuire à l’économie et pousser l’inflation à des nivaux hors contrôle.
Après la réélection du président Trump, la bourse de wall street a, sans surprise, battu des nouveaux records, alors qu’en Europe les marchés ont terminé dans le rouge et la monnaie unique a perdu du terrain face au dollar.
Selon des analystes chez Barclays, Trump est perçu comme pro-marché. Son programme repose grandement sur des baisses d’impôt, une moindre régulation et un climat favorable pour les entreprises.
* Premier mandat 2016-2020
Avant de se lancer dans l’avenir de la première économie au monde avec l’ère Trump II, arrêtons nous en quelques lignes sur le premier mandat du président réélu, qui selon lui « le meilleur de tous les temps ».
Donald Trump a pris le pouvoir en 2016, alors que l’économie américaine s’était fortement redressée après la crise des subprimes de 2008 avec une reprise qui a permis de réduire le chômage à un taux de 4.7% et le PIB dépassait de plus de 5% son niveau d’avant la crise. Donc, l’élection du président républicain en 2016 intervenait dans un contexte économique favorable.
Entre 2016 et 2019, la promesse du président de baisser l’impôt de 8% a été actée par un accord avec le congrès fin 2016 et a profité à tous les ménages imposables. Avant son élection, le candidat Trump a promis que la dette publique doit disparaître sur huit ans en réduisant les dépenses fédérales de 1% chaque année à l’exception de la défense et de la santé. Ces baisses promises ont été abandonnée et la politique fiscale des USA s’est traduite par un accroissement de la dette fédérale qui atteint plus de 23 mille Mds de $ début son premier mandat. Aujourd’hui elle atteint les 35.000 Mds
Quant aux relations commerciales avec son pays, le candidat Trump avait exprimé pendant sa compagne électorale du premier mandat ses intentions de réduire la différence considérée comme défavorable aux intérêts de son pays notamment le déficit commercial dû, selon lui, aux accords commerciaux antérieurs et a promis de taxer les importations et en particulier en provenance de la chine deuxième puissance mondiale après l’Amérique. Donald Trump s’était engagé à renégocier ces accords (à la hausse) pour rééquilibrer les relations commerciales avec l’extérieur en faveur de son pays. Cette hausse ne vise pas seulement la chine, mais aussi Le Mexique, Le Canada, La Turquie et l’Union Européenne.
En 2019, la pandémie de covid-19 a changé la donne. Tous ce que le président Donald Trump prétend réaliser en 3 ans a été effacé par cette pandémie. En conséquence les dépenses fédérales ont grimpé et le taux de chômage atteint le 15 % ce qui ne plait pas trop aux américains.
* Promesses pour le deuxième mandat 2025-2029
Avec le retour du président Trump à la maison blanche, le pays risque de connaitre un protectionnisme qui menace l’ouverture de la super puissance économique au monde.
* L’intention du président réélu d’imposer une forte taxe aux importations chinoises et européennes et en certain mesure aussi sur les produis canadiens et mexicains, ne passera pas sans conséquences graves à la fois pour l’économie américaine et celle de la chine qui est déjà affaiblie par le ralentissement de la consommation et elle cherche donc à exporter plus.
Le Cas de la Chine
Durant son premier mandat, M.Trump avait imposé une série de droits de douane sur des produits chinois avec pour objectif de forcer Pékin à négocier l’achat de produits américains, en vue de rééquilibrer une balance commerciale déficitaire pour les Etats–Unis concernant les échanges bilatéraux.
Selon l’ancien secrétaire du trésor américain Steven Mnuchin la mise en place de droits de douane particulièrement élevés sur les produits chinois importés aux Etats-Unis, est nécessaire car La Chine ne respecte pas tout ce qui été signé lors de la première phase de l’accord commercial. Donald Trump menace d’imposer les produits chinois à hauteur de 60% et à 100 % sur certains produits et imposer les produits européens à hauteur de 10 voir 20 % pour financer la baisse d’impôt qu’il a souhaité réaliser.
La Chine a prévenu le mois dernier qu’ « il n’y aura pas de gagnant dans une guerre commerciale », après la réélection de Donald Trump. Mais des analystes estiment que la victoire de Trump pourrait pousser les dirigeants chinois à renforcer un plan de relance économique notamment pour faire face aux futurs tarifs douaniers supplémentaires. Il reste à savoir si l’économie chinoise peut résister à un nouveau scénario qui met en danger les relations sino-américaines.
Si Trump met sa menace à exécution, ces énormes droits de douane pourraient affecter 500 milliards de dollars de produits chinois exportés vers les Etats-Unis, selon Pine Bridge Investments, sachant que les données douanières ont montré en Novembre 2024 que les exportations chinoises ont bondi de 12.7% en Octobre sur une base annuelle en valeur, tandis que les importations ont chuté de 2.3%.
Le Cas de l’Europe
Des nombreux acteurs, en effet, s’inquiètent des conséquences de la politique défendue jusqu’ici par le président Trump pour l’économie européenne. Rappelons que les Etats-Unis étaient un très grand partenaire commercial de l’Europe.
Selon le gouverneur de la banque de France François Villeroy de Galhau Une administration Trump, avec une forte taxe prévue sur les produits chinois et européens, entrainera probablement plus de protectionnisme et donc le retour de l’inflation, au moins au Etats-Unis, et à priori moins de croissance partout dans le monde. Devant ce danger à venir, le gouverneur appelle à une « remobilisation européenne ».
La BCE réagit
La présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, a frustré les européens avec des déclarations frappantes fin Novembre dernier sur la guerre commerciale que le président élu américain Donald Trump devrait lancer contre le Vieux continent et d’autres partenaires commerciaux.
Lagarde s’est exprimée dans une interview au Financial Times, exhortant les dirigeants européens à coopérer avec Trump plutôt que de répondre à ses menaces d’imposer des droits de douane drastiques.
Lagarde a même appelé l’Europe à «acheter davantage de produits américains» pour éviter une guerre commerciale qui pourrait entraîner un déclin de la croissance économique mondiale, faisant référence à la nécessité d’éviter un affrontement avec le président élu.
Cela survient près d’un mois après une réunion des dirigeants de l’Union européenne, au cours de laquelle ils ont appelé à l’autonomie et à investir davantage dans l’industrie, dans le but d’atteindre l’autosuffisance, de sorte que toute guerre commerciale ait un impact limité sur l’économie européenne.
Trump s’est engagé à imposer des droits de douane complets allant jusqu’à 20 % sur toutes les importations non chinoises vers les États-Unis, à un moment où le volume des échanges commerciaux entre le bloc et les États-Unis dépasse 1 300 milliards de dollars.
Les actions des entreprises d’automobiles et agricoles de l’Union européenne ont chuté de 1 à 8 %, à la suite des déclarations de Trump dans lesquelles il a confirmé qu’il signerait l’imposition de droits de douane sur les partenaires commerciaux de son pays, à un taux allant jusqu’à 20 %, à partir du 20 janvier prochain (premier jour de prise du pouvoir).
Lagarde a déclaré dans son interview qu’il est nécessaire que l’Union européenne adopte une « stratégie du carnet de chèque» qui comprend la soumission d’offres d’achat de produits américains, tels que le gaz naturel liquéfié et les équipements de défense, au lieu de s’engager dans des confrontations mutuelles qui conduisent à une escalade des échanges commerciaux.
Elle a expliqué que cette stratégie serait plus bénéfique que l’adoption de politiques de représailles qui pourraient conduire à une « guerre économique sans victoire ».
La victoire du président américain républicain pour un second mandat fait craindre parmi les gouvernements de l’Union européenne que ses politiques n’éliminent l’important excédent commercial de l’Union avec les États-Unis et obligent les entreprises européennes à transférer leur production vers le territoire américain.
Selon les données d’Eurostat, l’excédent commercial de l’Union européenne avec les États-Unis a atteint environ 190 milliards de dollars en 2023. Cet excédent indique que la valeur des exportations de l’UE vers les États-Unis dépasse largement la valeur de ses importations en provenance de ce pays, et il comprend des secteurs majeurs tels que les produits manufacturés, les médicaments, les automobiles et les produits agricoles.
Cependant, l’excédent est l’une des causes les plus importantes des tensions commerciales entre l’Union européenne et les États-Unis, car Trump estime qu’il reflète des pratiques déloyales ou des déséquilibres dans les relations commerciales entre les deux parties.
La commission européenne craint que les politiques protectionnistes américaines menacent directement les économies européennes, affaiblissant ainsi la compétitivité des entreprises européennes sur les marchés mondiaux.
Options européennes
Face à ce défi, l’Europe se trouve confrontée à deux options principales : soit répondre de la même manière en imposant des mesures punitives aux États-Unis, soit tenter de négocier des accords évitant de nouveaux tarifs douaniers.
Cependant, bien qu’il existe des options pour faire face à la crise, les dirigeants européens ont des doutes quant à la capacité du bloc européen à agir de manière unie pour affronter la politique de Trump. Les grandes économies en Europe, on note par exemple l’Allemagne et la France sont très occupées aujourd’hui par la situation économique actuelle interne.
Le 20 Janvier 2025 sera, donc, une date marquée dans l’histoire commerciale des Etats-Unis et peut être un retour au protectionnisme.