Financement Durable pour un Environnement Durable:
L’Engagement des Banques Européennes pour l’Écologie
Alors que les Nations Unies poursuivent activement leur initiative pour réaliser la Vision 2030 en matière de développement durable et de protection de l’environnement, les banques européennes, en particulier en France, redoublent d’efforts pour financer des projets écologiques. Toutefois, la gestion des risques climatiques demeure un défi majeur pour ces institutions, désireuses de contribuer au financement durable en alignement avec les objectifs des Nations Unies, notamment l’Objectif 17, qui vise à renforcer le partenariat mondial pour le développement durable. Il est clair que la réalisation de ces objectifs ne peut être accomplie qu’à travers un engagement concerté des États et de leurs institutions, favorisant une coopération mondiale pour garantir que personne ne soit laissé pour compte.
Pour participer à cette initiative colossale et respecter ses exigences, les banques se retrouvent au cœur de la problématique, car le financement durable fait partie intégrante de leurs missions, notamment dans la gestion des risques. Aujourd’hui, il est évident que les effets néfastes des fluctuations climatiques impactent négativement l’ensemble de l’économie, y compris le secteur bancaire. Après des années d’hésitation, les banques européennes ont décidé de prendre des mesures concrètes en réponse à cette crise environnementale mondiale, poussées par leurs clients ainsi que par la Banque centrale européenne (BCE).
Depuis 2020, la BCE s’est engagée dans une vaste entreprise visant à évaluer l’impact des risques climatiques sur les portefeuilles financiers des banques privées européennes. Les grandes banques européennes sont ainsi confrontées à un examen rigoureux pour déterminer si elles intègrent les risques climatiques dans la gestion de leurs actifs financiers. Cette question a d’ailleurs été soulevée lors des assemblées générales annuelles des grandes entreprises du CAC 40 à Paris en avril dernier, une préoccupation centrale dans le paysage financier actuel.
Les banques jouent un rôle clé dans le financement des activités économiques, y compris celles des entreprises qui cherchent à adopter des modèles respectueux de l’environnement. Cependant, la capacité à mesurer ces enjeux constitue le principal défi.
Pour accompagner les entreprises souhaitant évoluer vers un modèle plus vert, l’Union européenne pousse dans plusieurs directions, notamment en évaluant la part des actifs bancaires actuels et futurs alignés avec les objectifs de protection du climat. Cela inclut la mesure des investissements dans les énergies fortement carbonées, telles que le pétrole et le charbon, ainsi que dans les énergies renouvelables.
Dans ce contexte, une étude menée par le cabinet mondial de conseil en comptabilité et audit KPMG, dont un siège important se trouve à Paris, publiée en mai dernier, a révélé que la méthode de calcul actuellement adoptée par l’Autorité bancaire européenne pour mesurer les efforts des banques en faveur du climat nécessite une révision. Selon KPMG, la méthode actuelle ne reflète pas fidèlement les actifs bancaires investis dans des projets visant à préserver le climat, notamment dans les domaines de l’énergie solaire ou éolienne.
L’étude indique que seulement 3 % des actifs financiers des banques européennes répondent aux critères du «label vert» pour le financement durable, entré en vigueur début 2023, qui vise à promouvoir des activités économiques respectueuses de l’environnement. Ce pourcentage, jugé très bas par KPMG, résulte d’une évaluation incorrecte, ce qui est regretté par de nombreuses banques européennes, bien que l’étude ne cite pas de noms spécifiques.
En conséquence, certaines banques en Europe ont choisi d’utiliser leurs propres méthodes de calcul, malgré le risque de ne pas parvenir à une évaluation précise.
Selon la BCE, qui s’est engagée depuis quatre ans dans l’initiative de financement vert, « tout capital qui n’est pas résilient face aux risques climatiques verra sa durée de vie réduite ». Cela pourrait se traduire par une dégradation significative, entraînant d’énormes risques financiers. Depuis 2020, la BCE évalue l’impact des fluctuations climatiques sur les lignes financières des banques privées européennes et non européennes ayant des activités financières significatives dans la zone euro. La BCE n’a pas tardé à adopter une position ferme et un ton sévère envers les banques, les invitant à fournir de nouvelles données sur le financement additionnel, comme des chiffres indiquant la part des actifs bancaires liés au carbone, par exemple.
Selon la BCE, seulement 6 % des banques européennes ont fourni des données suffisantes dans les cinq catégories de risques climatiques, notamment la montée du niveau des eaux, les inondations et la sécheresse, qui sont considérées comme des risques majeurs.
Ainsi, le Conseil consultatif prudentiel de la BCE a exhorté les banques de l’Union à combler les lacunes et à mettre en place une stratégie pour respecter les nouvelles normes, en particulier celles relatives au climat, mises en avant par l’Autorité bancaire européenne. À défaut, l’Autorité bancaire européenne impose des sanctions aux banques, parmi lesquelles une amende pouvant atteindre 5 % du produit bancaire quotidien de la banque concernée. De plus, cette sanction pourrait s’élever à des dizaines de millions d’euros en six mois, par exemple.
Le Cas Français
Depuis 2022, les banques françaises ont considérablement réduit leur financement du secteur énergétique polluant, comme les combustibles fossiles (pétrole et gaz), selon le 15e rapport intitulé Banking on Climate Chaos, publié annuellement en collaboration avec des ONG défendant le climat. Parmi les banques françaises engagées dans cette voie, BNP Paribas se distingue, ayant été l’un des principaux financeurs de l’industrie pétrolière.
Toutefois, cette banque a réduit son soutien à ce secteur, bien qu’elle reste la cible des ONG, qui l’ont poursuivie en justice l’année dernière pour non-respect des obligations environnementales et climatiques.
Selon le rapport, BNP Paribas a financé le secteur des combustibles fossiles à hauteur de 187 milliards d’euros depuis 2016, un secteur reconnu comme le principal pollueur de l’environnement mondial.
En général, plusieurs banques françaises respectent les efforts internationaux pour protéger l’environnement et préserver le climat, bien que leurs contributions restent modestes par rapport à leurs milliards de profits. Cela représente une petite part de ce qu’elles pourraient réellement accomplir en termes d’efforts significatifs.
Malgré ces efforts, les banques continuent de financer le secteur du pétrole et du gaz dans le monde, mais la contribution des banques françaises, notamment les quatre grandes banques comme BPCE, Crédit Agricole, Société Générale et BNP Paribas, a diminué de 10 milliards d’euros en 2023 par rapport à 2022, pour atteindre 40 milliards, selon le rapport. Cette baisse représente 6 % du financement mondial, bien en dessous de leur part habituelle sur le marché.
Globalement, les 60 plus grandes banques mondiales ont prêté ou facilité des financements à hauteur de 706 milliards de dollars (en baisse de 10 %) pour des projets liés aux combustibles fossiles. Parmi ces banques, on trouve des géants tels que JP Morgan, avec un financement de 41 milliards de dollars pour le secteur pétrolier et gazier en 2023, Mizuho avec 37 milliards de dollars, et Bank of America avec 34 milliards de dollars. En Europe, la banque britannique Barclays arrive en tête des financeurs de ce secteur polluant, avec 24 milliards de dollars, suivie par BNP Paribas, avec 12,2 milliards, puis Crédit Agricole, avec 11,7 milliards, et Société Générale avec 8,7 milliards.
Depuis les accords de Paris de 2015 sur le climat, visant à limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré, les banques ont accordé des prêts de 7 000 milliards de dollars pour financer des projets dans le secteur des combustibles fossiles. Depuis 2021, l’Agence internationale de l’énergie a indiqué qu’aucun nouveau projet de pétrole, de gaz ou de charbon ne devrait être lancé si l’objectif est d’atteindre zéro émission d’ici 2050, conformément aux accords de Paris.
Les ONG qui défendent les droits environnementaux et la protection du climat utilisent les conclusions de l’Agence internationale de l’énergie pour inciter les banques à cesser de financer le secteur le plus polluant de l’environnement.
En réponse, BNP Paribas a fixé un objectif ambitieux : réduire de 70 % son financement du secteur pétrolier, gazier et charbonnier d’ici 2030, tout en augmentant son soutien aux projets énergétiques à faible émission de carbone à hauteur de 90 %. Cela signifie que pour chaque euro investi dans les combustibles fossiles, 11 euros seront investis dans les énergies renouvelables, une initiative saluée par les ONG, bien qu’elles restent partiellement sceptiques quant aux intentions réelles des banques dans cette direction.
Mazen Hammoud Analyste Économique / Paris